L’ALGUIER
Inspiré d’un alguier du XIXe siècle ainsi que par sa résidence d’artiste, la série de dessins et la lecture des légendes par l’artiste célèbrent la diversité des espèces d’algues. L’Alguier rend justice à leur beauté, en nous invitant à questionner nos préjugés sur ces végétaux aux nombreux bienfaits.
D’arpès la rencontre entre l’artiste Gwen Le Gac et l’enseignante-chercheuse Ingrid Arnaudin au laboratoire LIENSs (La Rochelle Université, CNRS)
Contenu scientifique
Étude des molécules présentes dans les algues du littoral et de l’algoculture charentaise.
À La Rochelle Université, une équipe du laboratoire Littoral Environnement et Sociétés (LIENSs) étudie comment valoriser les différentes molécules produites par les algues. Si ces végétaux marins peuvent être directement consommés et apporter d’excellents éléments nutritifs, il est également possible d’en extraire des composés qui trouvent des applications dans différents domaines, notamment celui de la santé.
Valoriser la biodiversité marine par les biotechnologies
Une partie des travaux de recherche menés au laboratoire LIENSs se fait dans le domaine des biotechnologies bleues qui vise à explorer la diversité chimique des organismes marins en vue de concevoir de nouveaux produits pour des secteurs variés (agronomie, nutrition, pharmacie, cosmétique, agroalimentaire).
Ce domaine des biotechnologies est très en prise avec le monde socio-économique. En effet, la plupart des recherches du laboratoire se font en partenariat avec des entreprises des secteurs concernés qui lui fournissent les ressources biologiques et bénéficient en retour de l’expertise des scientifiques pour leurs besoins d’innovations.
Dans ce domaine, les grandes algues apparaissent comme une ressource biologique particulièrement prometteuse. En effet, ces végétaux marins sont largement distribués dans les zones froides, tempérées et tropicales. Ils jouent un rôle crucial dans le maintien des écosystèmes marins et génèrent de nombreux composés qui ont pour fonction par exemple de les protéger des effets de la lumière.
Les algues, une ressource pour la santé
Les algues présentent de multiples avantages pour la santé humaine. Consommées directement, comme des légumes, elles ont une grande valeur nutritionnelle : elles sont pauvres en lipides, riches en protéines, minéraux, vitamines, antioxydants et acides aminés essentiels. Des études ont montré qu’un régime riche en algues réduisait l’incidence de l’obésité, du cancer et des maladies cardiaques et cérébrovasculaires.
Les différents composés produits par les algues peuvent également faire l’objet d’innovations qui trouvent des applications bien spécifiques. Par exemple, les végétaux marins produisent des sucres comme l’agar, les carraghénanes et les alginates qui sont utilisés depuis des siècles par l’homme dans l’alimentaire pour leurs propriétés émulsifiantes et gélifiantes.
En termes de valorisation, l’équipe de chercheurs et chercheuses du LIENSs travaille, entre autres, sur des applications thérapeutiques. En effet, les algues produisent un groupe de molécules appelé « polysaccharide », que l’on qualifie généralement de « sucre marin », et qui pourrait être utilisé dans le traitement des cancers du sein, particulièrement contre ses formes les plus agressives.
Les algues apparaissent donc comme une ressource biologique naturelle intéressante pour les industries qui les cultivent comme pour celles.
L’algoculture sur l’île de Ré
Afin de créer et pérenniser une filière de valorisation des algues, il est important d’assurer en amont leur production et de sécuriser leur approvisionnement. Qu’elle soit destinée à la consommation directe d’algues ou à leur valorisation en laboratoire, l’algoculture est une activité qui progresse en France. En Charente-Maritime, l’équipe du laboratoire LIENSs travaille en étroite collaboration avec l’entreprise Algorythme, qui pêche et développe la culture des algues à Ars-en-Ré.
Algorythme, habilitée et certifiée « impact neutre » par la direction départementale des territoires et de la mer pour le prélèvement, la récolte et l’exploitation des algues en Charente-Maritime utilise des méthodes respectueuses de l’environnement. Pour la récolte directe sur l’estran, les algoculteurs coupent les algues aux deux tiers de la plante, cette méthode stimule la production de spores et donc la reproduction des algues dans leur milieu naturel. Ainsi, par cette pratique, la partie du littoral exploitée a vu sa biodiversité se développer au fil des ans.
A côté d’une pêche traditionnelle sur l’estran, Algorythme réhabilite d’anciens marais ostréicoles afin d’y développer une culture d’algues à partir de l’ensemencement de cordages. Cette méthode permettra ainsi d’avoir une production mieux contrôlée en quantité et en qualité.
Approche artistique
Pour concevoir son module, Gwen Le Gac, artiste bretonne, s’est inspirée d’un alguier du 19e siècle : Algues marines du Finistère rédigé par Hippolyte et Pierre-Louis Crouan et publié en 1852. Il s’agit d’un herbier d’algues qui rassemble 404 échantillons du Finistère. Chaque page de l’ouvrage pré- sente une algue séchée et collée, accompagnée d’une étiquette imprimée qui précise le nom de l’espèce, cite les auteurs principaux qui ont décrit où figuraient ces plantes, le lieu et l’époque précis de la rsaécolte. Gwen Le Gac a accédé à une version numérisée de l’ouvrage, et sa découverte a fait germer en elle l’idée d’intégrer des dessins dans son œuvre.
La résidence à La Rochelle Université, sa rencontre avec les chercheurs du laboratoire LIttoral Environnement et Sociétés (LIENSs) et la visite de la ferme algocole, lui ont permis d’étoffer sa proposition artistique en 3 parties :
- 20 dessins réalisés au feutre avec une technique aquarelle, et reproduits par sérigraphie sur 20 plaques de plexiglass coulissantes. Le visiteur peut créer des compositions en faisant cou- lisser les plaques pour les superposer.
- Une plaque dessinée représentant son interprétation d’une cellule végétale d’algue, visible à tra- vers la modélisation d’un microscope.
- Un enregistrement de la voix de l’artiste (à écouter au casque) qui lit les légendes de l’alguier des frères Crouan, informant de manière poétique les visiteurs sur l’environnement des algues.
“On imagine souvent les algues vertes ou noires, séchées et pourrissantes sur les plages, alors qu’elles sont aussi belles et diverses que des fleurs ! Conserver, enseigner et chercher sont les valeurs d’un alguier, je vois dans les vieux alguiers leur poésie, ils sont déjà à la frontière de l’art. Et poésie encore à la lecture des légendes associées à la « florule », la tonalité des noms scientifiques, la localisation et le vocabulaire du rivage.”
